Pourquoi investir dans le marketing et le branding
Les dérives du marketing
J’ai beau travailler dans la sphère du marketing, certaines choses m’exaspèrent :
- les ouvertures faciles impossibles à ouvrir
- les fausses appellations comme « cuit au torchon » sur le jambon, ou « cœur de bœuf » sur les tomates qui n’ont conservé de la cœur de bœuf que la forme (j’ai vu pas mal de reportages sur le sujet)
- les câbles de chargeurs d’IPhone qui partent en morceau (et l’obsolescence programmée)
- les pubs insupportables avec des acteurs qui jouent faux (cadeau : Panzani https://www.youtube.com/watch?v=ZHRxs-zpaiE)
Je vous laisse compléter la liste !
Cependant, elles ne sont pour moi que les conséquences d’un mauvais marketing. D’incohérences qui portent préjudice à l’image de ces marques et à la confiance qu’ont placée leurs consommateurs en elles.
La marque Abercrombie & Fitch en a d’ailleurs fait les frais. Elle a tout misé sur une image de marque branchée alors que ses produits sont réputés très chers pour une piètre qualité. La marque a en plus adopté une stratégie de communication qui fait polémique : elle fait l’éloge de la « minceur et de la beauté » (ou plutôt de la maigreur et de la beauté : la preuve avec le lancement d’une ligne taille XXXS en 2014), et assume totalement s’adresser aux enfants populaires comme l’affirmait le PDG il y a quelques années : « Dans chaque école, il y a les enfants cool et populaires, et puis il y a les enfants pas tellement cool. En toute honnêteté, nous nous adressons aux enfants cool ».
Résultat : les consommateurs ont dit stop et ses ventes sont en baisse continue en Europe. (Pour en savoir plus : http://www.focusur.fr/a-la-une/2014/11/14/abercrombie-devenue-marque-ringard-en-France).
Même les marques issues de multinationales peuvent de moins en moins se permettre de « tricher » car les consommateurs sont de plus en plus avertis, exigeants et méfiants… Et ce malgré les énormes moyens déployés en publicité pour faire oublier qu’il s’agit seulement de positionnements marketing (ex. Danone qui avait du se résoudre à changer « Bio » en « Activia »).
A contrario, celles qui perdurent sont celles qui adoptent une image de marque conforme à leur identité.
L’importance du branding :
En effet, c’est le principal message que nous avons essayé de faire passer avec Aurélie Ronfaut dite Thi-lùu (http://www.thiluu.com) la semaine dernière, lors de l’atelier que nous avons animé sur le pouvoir de l’image de marque au Coworkin’Aix.
Une « bonne » communication est une communication cohérente dans son ensemble.
Le « branding » consiste à positionner une marque dans l’esprit du consommateur pour réunir « identité de marque » et « image de marque » :
> L’identité d’une marque est ce qu’elle est, fondamentalement. Elle est constituée bien sûr des produits et services (ex avec Orangina qui a fait de sa faiblesse – la pulpe qui « reste en bas » – une force, et dont la forme de la bouteille est facilement reconnaissable), mais également d’un ensemble de valeurs et d’une personnalité, d’un patrimoine.
> L’image de la marque est la manière dont elle (marque/entreprise/personnalité) est perçue par le public.
Cette perception passe par une multitude d’éléments physiques et immatériels : nom+signature, identité visuelle (typo, couleurs, formes, symboles, style photographique…), produits et services eux-mêmes (design, qualité, packaging, prix), lieu de vente, communication (ton employé sur les réseaux sociaux, dans la pub, les évènements…).
Cet ensemble de signes génère des émotions. Certaines sont personnelles mais pour la plupart elles sont partagées collectivement. Comme la sémiologie (science des signes) l’explique, nous sommes en effet fortement conditionnés culturellement parlant. Les couleurs ont par exemple différentes significations en Europe et en Asie.
La sémiologie et le branding s’intéressent à cette part collective pour pouvoir transmettre l’identité d’une marque à une cible définie. Plus la cible visée est restreinte, plus elle forme un ensemble cohérent, et plus il sera facile de transmettre un message/des émotions.
Le branding se situe bien en amont de la publicité : il touche au nom, au produit/service, à l’identité visuelle, tandis que la publicité sera l’une des expressions possibles du branding (ponctuelle au même titre qu’un évènement).
Il permet à une marque de :
- se démarquer
- garantir/rassurer
- valoriser le consommateur
- fidéliser
Et donc : de lui donner de la valeur ! Le branding apporte à la marque d’autres dimensions :
Fonction transactionnelle + fonction identitaire (sentiment d’appartenance à une communauté) + fonction aspirationnelle (terme souvent moqué, il est pourtant important = qui touche aux motivations profondes des consommateurs : ce à quoi aspire la cible).
Le branding permet de se positionner sur un marché, d’affirmer sa singularité, sa différence. Bien sûr une marque ne peut pas plaire à tout le monde mais c’est bien l’intérêt ! Plaire à tout le monde, c’est ne séduire personne. Il faut réussir à attirer les « clients idéaux ». Ceux qui feront du bouche à oreille gratuitement, qui seront fidèles.
Prenons comme exemple l’univers de la mode : les marques Desigual et Naf Naf fonctionnent toutes les 2 très bien mais leur positionnement et leur cible sont totalement différents !
Parce qu’elles ont accepté de ne pas plaire à tout le monde et s’adressent à une certaine cible, avec une cohérence à tous les niveaux : style vestimentaire, identité visuelle, boutiques, pub, évènements…
Et c’est valable dans n’importe quel secteur.
Dans l’univers des banques en ligne par exemple, les marques Soon et BforBank ont elles aussi adopté un branding efficace à destination de 2 cibles différentes.
Les petites entreprises ne devraient pas négliger cet aspect non plus !
Prenons l’exemple des glaciers : une grande partie d’entre eux n’a aucun branding. Ils pensent que la qualité de leurs glaces suffira à faire la différence. Et c’est vrai pour certains qui sont implantés depuis longtemps, et pour lesquels le bouche à oreille et la renommée suffisent. Mais ceux-ci ne pourraient tout de même pas développer de franchise s’ils le souhaitaient, car il faut un concept fort et unique (non facilement copiable) pour cela, à l’image d’Amorino par exemple (forme des glaces, identité visuelle, univers boutique…).
Construire une plateforme de marque
Pour créer un branding cohérent, il faut poser les fondamentaux de la marque pour définir une stratégie (oui, c’est ça mon métier ;)). Dans le jargon, on parle de « plateforme de marque ».
Cette plateforme, généralement très schématisée/visuelle, permet de construire étape par étape un branding cohérent.
Pour cela on doit comprendre à qui on s’adresse (cible) et contre qui on se « bat » (concurrence) : quelles sont les attentes et motivations profondes des cibles (lire mon article sur l’insight consommateur : https://www.madewithcuriosity.com/insight-consommateur/), les tendances du marché, les différentes stratégies de positionnement et donc les leviers de différenciation.
Cette étape cruciale d’audit de marché, faite d’observation, de recherches et d’analyse est fondamentale, pour pouvoir définir la « promesse marketing » et les preuves que l’on apporte au consommateur pour qu’il croit en cette promesse.
Une promesse seule est bien sûr insuffisante puisqu’elle peut être similaire à celle que propose une autre entreprise : il faut donc également définir ce qui différencie la marque de ses concurrents > c’est le positionnement. Généralement on le formule de cette manière, en se comparant aux autres : « le leader de… », « la marque la plus… », « l’alternative à… ».
C’est sur cette base, en cohérence avec l’identité de la marque (valeurs, personnalité, patrimoine), que l’on va pouvoir créer tous les éléments qui constitueront son image : nom, identité visuelle, discours…
Ceux-ci seront utilisés sur tous les supports de communication (site, plaquette, carte de visite…). Cette plateforme de marque est également garante de la cohérente de toutes les actions de communication (ponctuelles) avec la stratégie : évènementiel, pub, etc.
Cette plateforme est aussi bien utilisée pour créer une marque que pour en « repositionner » : dans ce 2e cas, on s’attache à analyser les choix de la marque pour déterminer s’ils sont cohérents avec les attentes des cibles, les tendances de consommation, les concurrents en place, les valeurs et la personnalité de la marque, etc.
L’objectif étant de vérifier que l’identité de marque est bien transmise à travers son image (et tous les signes qui la composent). Etre conscient de ses atouts est également essentiel pour bien les valoriser et ainsi s’affirmer pour mieux se démarquer.
Conclusion
La saturation des marchés a rendu le branding (et donc le marketing et le design) indispensable, car le prix ou la technologie ne sont plus des facteurs de différenciation suffisants.
Et les consommateurs étant de plus en plus méfiants et exigeants, cela pousse finalement à adopter la meilleure stratégie de marque possible.
Les startups qui parviennent à lever des fonds sont celles qui ont compris l’intérêt du branding et qui viennent concurrencer des entreprises à l’image vieillissante… qui devront s’adapter pour survivre.